LGV-POCL : nos réactions – Contribution sur le coût et les financements le bilan socio-économique du projet : un investissement non rentable conduisant à abandonner le projet et envisager d’autres solutions. (voir à la fin de l'article)

ASSOCIATION « BIEN VIVRE AU BOIS-D’OINGT ET EN PAYS BEAUJOLAIS »

Association agréée au titre de l’environnement pour le département du Rhône

Contribution sur le coût et les financements

du projet de LGV- Paris-Orléans- Clermont-Lyon

le bilan socio-économique du projet : un investissement non rentable conduisant à abandonner le projet et envisager d’autres solutions. (Voir p.6)

Les éléments regroupés ici proviennent de : l’Instruction cadre relative aux méthodes d’évaluation des grands projets d’infrastructure du 25 mars 2004, mise à jour le 27 mai 2005 (Ministère Equipement, transports et de l’aménagement du territoire) et du Dossier de RFF pour le projet POCL.

Le financement de ce projet sera apporté à 85 % par des crédits publics (moitié Etat et moitié collectivités territoriales). Il est donc important de s’assurer du bilan socio- économique pour la collectivité. C’est la balance des avantages et des inconvénients monétaires et monétarisables de ce projet, rapportée au coût complet.

Les indicateurs normalisés à prendre en compte :

Le bénéfice actualisé pour la collectivité : c’est la différence entre les avantages et les coûts de toute nature eux-mêmes actualisés. La Valeur actualisée nette (VAN) détermine si un investissement est rentable.

Le bénéfice pour la collectivité par euro investi. Cet indicateur est utile pour comparer des projets alternatifs ou des variantes. Il permet pour la collectivité de se prononcer sur l’opportunité de réaliser un projet , de choisir entre des projets alternatifs ou d’utiliser autrement ses moyens financiers . Inférieur à 1, la collectivité perd de l’argent.

Dans les éléments d’évaluation à présenter lors de la concertation, le dossier devrait donner une estimation du montant de l’investissement pouvant être couvert par les recettes à percevoir des usagers, nettes de charges d’entretien et d’exploitation : ici les recettes espérées en location des voies et suppléments de recettes apportées par les voyageurs sont évaluées à 15 à 20% du coût, ces 15 à 20% étant amortis en 50 ans.

Le projet de LGV POCL

Le bilan est établi sur une période de cinquante ans, de 2024 à 2074. Tous les paramètres sont valorisés en euros de 2008. La valeur actualisée est de 4% de 2024 à 2034, 3,5% de 2035 à 2054, 3% au-delà. Le bilan analysé est celui du scénario médian –Roanne, sachant que le bilan du Médian-Mâcon est légèrement meilleur et que les scénarios ouest et ouest sud sont beaucoup moins bons.

Les avantages du projet sont composés des recettes monétaires réelles (recettes qui seraient perçues par RFF et les transporteurs), auxquelles ont été ajoutées les « monétarisations » des avantages des différents acteurs. Dans ces avantages ont été pris en compte les temps gagnés par les voyageurs calculés en prix par heure (valeur du temps d’après le barème de 12 euros en 2ème classe et de 30 à 34 euros en 1e classe).

Les avantages sociaux-économiques pour les tiers comprennent : la diminution de tués et blessés sur les routes, les diminutions de pollution et de gaz à effet de serre et la réduction de la congestion routière qui permet aux véhicules routiers de rouler plus vite et de gagner du temps.

Bilan financier pour le scénario Médian par Roanne

Coûts et avantages du projet de LGV POCL d'après le dossier-Scénario Médian Roanne

en milliards d'euros

en %

Investissement

évaluation construction

12,8

coüt actualisé

18,788

valeur résiduelle à déduire

2,861

bilan investissement

15,927

Recettes monétaires

recettes acteurs ferroviaires

9,046

coûts clients

0,348

pertes autres acteurs

3,026

bilan monétaire

6,368

21,25%

Avantages monétarisés

gain temps anciens clients

15,985

gain temps nouveaux clients

1,417

retards évités

4,306

bilan avantage temps

21,708

72,46%

Avantages pour les tiers

valeur tués-blessés en moins

0,542

pollution diminution

0,222

gaz à effet de serre

0,833

réduction congestion routière

0,284

bilan avantages tiers

1,881

6,27%

Nuisances

non comptabilisées

Recettes + avantages

bilan

29,957

VAN totale

29,957- 15,927

14,030

VAN par euro investi

14,030 : 15,927

0,88

VAN par euro public investi 14,030 : 13,538

1,04

1 - Les investissements (dépenses du chantier)

La construction évaluée à 12,8 milliards d’euros a été actualisée à 18,788 milliards à diminuer de la valeur résiduelle en 2074 de 2,861 milliards. Investissements actualisés de 15,927 milliards

2 - Les recettes et avantages

  1. Recettes monétaires : ce sont les recettes des acteurs ferroviaires. Les anciens clients subiront une hausse du prix du billet justifiée par le temps gagné. Cette hausse est estimée à 3,458 milliards. Les nouveaux clients (y compris écrêtement) apporteront 12,203 milliards. A déduire les frais d’exploitation et d’entretien de la ligne.

Recettes estimées, dépenses de gestion courante déduites : 9,046 milliards.

Le bilan socio-économique pour les autres acteurs fait apparaître des pertes de recettes pour les acteurs routiers, les acteurs aériens et la puissance publique (perte de TVA) : perte des autres acteurs : - 3,026 milliards

Bilan monétaire : 9,046 – 3,026 = 6,020 milliards

2- Les avantages socioéconomiques non monétaires pour les clients :

Les avantages temps constituent la grande masse de ces avantages traduits en valeur monétaire. Les anciens clients gagneraient sur le temps passé en transport. Traduit en euros avec le barème officiel : 15, 476 milliards d’euros +0, 509 pour l’écrêtement 15,985 milliards d’euros.

Les nouveaux clients gagneraient aussi du temps pour 1,924 – 0,527, soit 1,397 milliards.

Total : 15,987+ 1,397= 17,384 milliards

Un nouveau critère temps est introduit : au cas où la ligne POCL ne se réalise pas les circulations de trains pourraient être ralenties avec des retards. Cette perte de minutes en régularité a été évaluée dans les avantages de POCL à 4,306 milliards d’euros. Dans ce cas, 1 à 2 minutes temps ont été comptées pour chaque voyageur, mais avec une valeur beaucoup plus forte (coefficient multiplicateur de 2,69) car « la minute de retard non prévue est beaucoup plus difficile à supporter pour le voyageur ». Dans le critère temps précédent on comptabilise un vrai temps gagné, alors que dans ce dernier critère on monétarise un temps que vous auriez peut-être eu le risque de perdre. L’introduction de ce second critère temps est extrêmement contestable et paraît artificiellement ajouté pour donner un semblant de rentabilité au projet.

Bilan global des avantages temps : 17,402 + 4,306 milliards = 21,708 milliards d’euros

Les avantages socio-économiques pour les tiers :

Diminution des tués et des blessés sur les routes : 0,542 milliards ; diminution de pollution 0,222 milliards ; diminution des gaz à effet de serre : 0,833 milliards ; réduction de la congestion sur les routes : 0,284 milliards

Total des avantages pour les tiers 1,881 milliards d’euros

IMPORTANT : A noter dans ce bilan socio-économique pour les tiers, n’apparaissent pas les valorisations des nuisances pour les riverains de la ligne (communes, habitants, agriculteurs...) : ni les émissions de bruit(elles ontpourtant été valorisées dans le projet LGV SEA pour 279 km). « En l’absence d’une évaluation précise de l’impact du projet (POCL) sur les nuisances sonores, celui-ci n’est pas valorisé à ce stade dit notre dossier» ; ni la diminution de valeur patrimoniale des biens situés à proximité de la ligne ; ni la destruction de l’environnement et des paysages pour lesquels aucune compensation financière ne peut être trouvée.

Quel bilan ?

Des recettes faibles

Les recettes monétaires comptabilisées sur cinquante ans, sont faibles par rapport à l’investissement nécessaire. Elles ne représentent que 21 % des « avantages » pris en compte dans l’évaluation générale. De plus elles risquent d’être absorbées par les taux d’emprunts ou les partenariats publics privés.

Une valorisation très forte du temps gagné

L’essentiel des avantages pris en compte et traduits en euros, concernent les gains de temps des voyageurs, anciens ou nouveaux. Il est exact qu’un gain de temps sur une longue distance est intéressant en confort et rapidité. Quel prix vaut-il ? Ici presque 22 milliards d’euros et 72% des avantages… moyennant une augmentation du prix du billet. Aurons-nous le choix de payer moins cher en allant moins vite ?

Et même du temps qui ne serait pas perdu

La prise en compte du temps va très loin : elle va même jusqu’à prendre en compte le coût de la minute qui aurait été perdue par les voyageurs si la LGV POCL ne se faisait pas et que la ligne LGV actuelle connaisse une saturation et des retards. De plus la valeur de ce temps est augmentée d’un coefficient de 2,69, tant ce temps est précieux.

Ce facteur « régularité » destiné à éviter les retards supposés est comptabilisé pour 4,306 milliards dans les avantages du projet. Ce paramètre ne devrait pas apparaître car il ne peut pas être comparé à d’autres lignes et solutions.

Quant au critère « avantages pour les tiers », il pourrait avoir un intérêt si étaient également prises en compte les nuisances subies par les habitants proches de la future ligne. Ignorer ou négliger ce facteur rend encore plus insupportable l’importance accordée aux minutes gagnées par le faible pourcentage de la population résidente qui utilisera régulièrement ces lignes.

Au total un bilan économique très fragile :

Il repose sur critères de rentabilité faibles et des avantages non financiers surévalués.

Il écarte entièrement les inconvénients et nuisances.

Si par exemple, on prenait en compte un facteur nuisances de bruit pour 2 milliards d’euros ; si on enlevait aussi ce critère minutes non perdues par suite de retards (des retards pouvant aussi se produire pour toutes sortes d’autres raisons, par exemple l’encombrement des gares… ou la météo…), critère qui n’a pas de sens ici, il faudrait déduire 6,3 milliards d’euros du bilan .

Les avantages seraient ramenés à 23,651 milliards d’euros, la VAN (valeur actualisée nette) totale passerait à 7,724 milliards, la VAN par euro investi à 0,48 et la VAN par euro public investi à 0,57

Rentabilité très faible par rapport aux autres projets ; rentabilité qui sera certainement annulée par les dépassements de coût du chantier.

Avec les surcoûts obligatoires du chantier, la collectivité publique risquerait de perdre une part importante de son investissement.

En conséquence, ce projet de LGV ne devrait pas dépasser le stade de l’étude car au moment des choix publics « la contrainte budgétaire impose de situer les projets les uns par rapport aux autres à l’aide du critère : valeur actualisée nette par euro public dépensé ».

A noter que dans tous les cas le choix du passage par Mâcon de la ligne principale est toujours moins coûteux que le passage par Roanne : il économiserait 600 millions d’euros dans le scénario Médian. Roanne serait desservie par des rames LGV venant de Paris par Moulins et reliée à Lyon, à Clermont et à Saint-Etienne par des lignes TER électrifiées et performantes.

Annexe 2Incertitudes économiques

  • Aucun des partenaires appelés à financer ne disposant des crédits, ils auront recours à l’emprunt. Avec quel taux d’emprunt ?

  • Il y aura augmentation de la dette de l’Etat et des collectivités. ..Avec une augmentation des impôts et (ou) l’abandon d’autres travaux ou d’autres dépenses ?

  • Exemple du financement de la ligne Tours-Bordeaux et de son mode de financement en Partenariat Public Privé qui vient d’être signé avec le groupe Vinci. Pendant 50 ans, le concessionnaire encaissera toutes les recettes des péages de cette ligne. L’Etat et les collectivités territoriales auront pourtant payé la moitié des travaux de construction, soit 3 milliards répartis entre Régions, départements, villes, communautés urbaines… A noter que dans le projet POCL, ce n’est pas 50% du financement que devraient apporter l’Etat et les Collectivités territoriales, mais 85 %.

  • La ligne de TGV Paris-Lyon actuelle a 30 ans : on nous dit qu’elle est vieillissante et insuffisante. Que récupéreront les collectivités publiques dans 50 ans ?

  • Qui décidera des priorités et des coûts de circulation sur ces lignes ferroviaires sous concession privée pendant 50 ans ?

Conclusions :

La question essentielle de l’opportunité de ce projet se pose donc pleinement.

En conséquence, nous demandons que soit complété ce dossier afin d’aider à la prise de décision politique, par la même étude de rentabilité socio-économique utilisée pour le projet de LGV -POCL, appliquée aux investissements TER qui seraient nécessaires dans chaque région du parcours de la ligne. Il faudrait calculer le chiffrage correspondant des minutes gagnées par les voyageurs TER, pour une dépense équivalente ou inférieure des collectivités publiques.

Enfin pour éviter la saturation annoncée en 2035 de la LGV Paris-Lyon ,nous demandons que l’hypothèse d’utilisation de la LGV Rhin-Rhône évoquée dans le dossier RFF des alternatives soit mieux étudiée et considérée comme l’un des scénarios possibles… en contrepartie d’un coût inférieur du prix du billet pour le voyageur qui choisirait ce circuit plus lent.

N.B : les données chiffrées ont été recalculées à partir des dossiers très complets de RFF. Elles demanderaient à être revérifiées en détail par les auteurs du dossier. Mais les ordres de grandeur sont incontestables.



Joomla templates by a4joomla